- Définition et descriptions
- 1. Dépistage, évaluation et diagnostic
- 2. Prise en charge des déficits cognitifs d’origine vasculaire
- 3. Réadaptation cognitive
- 4. Soutien aux personnes atteintes d’un déficit cognitif d’origine vasculaire, à leur famille et à leurs aidantes et aidants
- 5. Soins palliatifs et soins de fin de vie
Définitions et descriptions
Contexte : Le terme général « déficits cognitifs d’origine vasculaire » désigne divers tableaux cliniques et est associé à une évolution variable de l’atteinte, depuis les tout premiers symptômes légers ou mineurs à une extrémité du spectre jusqu’à la démence vasculaire profonde à l’autre extrémité. Il existe des stades même en cas de démence (dont le déclin léger, le déclin modéré et le déclin grave), qui sont définis par le Scottish Intercollegiate Guidelines Network (SIGN). Le document 168 du SIGN aborde l’évaluation et le diagnostic de la démence, ainsi que les soins et le soutien des personnes qui en sont atteintes et de leurs aidants et aidantes (Scottish Intercollegiate Guidelines Network 2023). Il est donc difficile de définir les déficits cognitifs d’origine vasculaire de manière simple et concise.
Le terme général « troubles cognitifs vasculaires » a été proposé et son utilisation pourrait être envisagée dans les futures versions du présent document. Aux fins des présentes lignes directrices, le terme « déficits cognitifs d’origine vasculaire » vise à englober diverses affections décrites dans la littérature, dont les suivantes : le « déficit cognitif léger d’origine vasculaire », qu’il touche une ou plusieurs fonctions; le « déficit cognitif d’origine vasculaire sans démence »; le « trouble neurocognitif léger d’origine vasculaire »; le « trouble neurocognitif majeur d’origine vasculaire »; les « troubles neurocognitifs mixtes » (par exemple, une maladie vasculaire cérébrale associée à la maladie d’Alzheimer ou à d’autres maladies neurodégénératives); et la « démence vasculaire ». Il est important de noter que les troubles neurocognitifs mixtes représentent la cause la plus fréquente de démence chez les personnes âgées.
Déficits cognitifs d’origine vasculaire
Description publique générale : Les déficits cognitifs d’origine vasculaire sont des affections du cerveau et de ses vaisseaux sanguins qui affectent certaines capacités cognitives, comme l’attention, la mémoire, le langage, la vitesse de traitement de l’information, le jugement et la résolution de problèmes.
Définition pour le grand public : Les déficits cognitifs d’origine vasculaire sont des affections caractérisées par des lésions des vaisseaux sanguins du cerveau qui endommagent le tissu cérébral, ce qui entraîne une altération de la capacité de réflexion et de la mémoire. Les déficits cognitifs d’origine vasculaire peuvent être causés par un AVC, de minuscules caillots qui bloquent les petits vaisseaux sanguins du cerveau, une hémorragie des petits vaisseaux sanguins du cerveau ou une maladie de la paroi vasculaire, ce qui réduit l’apport en oxygène et endommage les cellules cérébrales. Les facteurs de risque des déficits cognitifs d’origine vasculaire peuvent inclure des affections vasculaires comme l’AVC, l’insuffisance cardiaque, le diabète et l’hypertension artérielle, le tabagisme et des facteurs de risque modifiables des déficits cognitifs d’origine vasculaire en général. Ceux-ci peuvent comprendre un faible niveau de scolarité, un déficit auditif, l’obésité, la dépression, la sédentarité, le manque de contacts sociaux, la consommation excessive d’alcool et la pollution de l’air (Livingston et coll., 2020). Les déficits cognitifs d’origine vasculaire peuvent provoquer des symptômes allant de l’oubli léger à des problèmes plus graves touchant l’attention, la mémoire, le langage, la vitesse de traitement de l’information, le jugement et la résolution de problèmes.
La forme la plus grave de déficit cognitif d’origine vasculaire est la démence vasculaire. Celle-ci peut compliquer les activités quotidiennes, comme s’habiller et se laver. La démence vasculaire et la maladie d’Alzheimer peuvent partager certains signes et symptômes et peuvent survenir séparément ou en même temps, mais il ne s’agit pas de la même maladie.
Définition scientifique : Les déficits cognitifs d’origine vasculaire désignent une série de déficits cognitifs nouveaux ou s’aggravant, attribués à une lésion vasculaire cérébrale ou accélérés par celle-ci (Paradise et Sachdev, 2019).
- Déficits cognitifs : Le schéma des déficits cognitifs nouveaux ou s’aggravant dans les déficits cognitifs d’origine vasculaire peut englober l’ensemble des fonctions cognitives ou certaines d’entre elles, comme l’attention, l’apprentissage et la mémoire, le langage, la perception, la vitesse de traitement de l’information ou les fonctions exécutives comme la cognition sociale, la résolution de problèmes et la prise de décision. Les déficits cognitifs d’origine vasculaire peuvent également comprendre des déficiences liées à des syndromes focaux d’AVC tels que l’aphasie ou la négligence spatiale.
- Lésions vasculaires cérébrales (maladie vasculaire) : La cause prédominante est la maladie vasculaire associée à diverses manifestations (maladie symptomatique ou latente), y compris des infarctus corticaux ou sous-corticaux, des infarctus stratégiques, des maladies des petits vaisseaux avec des lésions de la substance blanche, des infarctus lacunaires ou des hémorragies cérébrales. Ces maladies vasculaires cérébrales peuvent être causées par divers troubles (comme l’AVC, l’insuffisance cardiaque, l’hypertension, la fibrillation auriculaire, l’arrêt cardiaque, le diabète, l’insuffisance rénale ou d’autres atteintes vasculaires). Ces derniers peuvent être isolés ou associés à d’autres processus neurodégénératifs, tels que la maladie d’Alzheimer, et donner lieu à des troubles neurocognitifs mixtes (également appelée « démence mixte »).
Dépistage : Le dépistage est un processus d’évaluation de la présence éventuelle d’un problème particulier. Le dépistage est une action ou une investigation délibérée visant l’identification précoce des personnes à risque de développer une affection, un trouble ou un problème particulier. Le dépistage peut révéler l’existence possible d’un problème. Les résultats d’un dépistage peuvent indiquer la nécessité d’une évaluation plus exhaustive. Le dépistage est généralement bref et sert à cerner d’éventuelles préoccupations, et non à poser un diagnostic. Les prestataires de soins de santé peuvent utiliser des mesures de dépistage préliminaires pour faciliter la prise de décision clinique.
Évaluation : L’évaluation est un processus qui permet de définir et de mesurer la nature du problème, d’orienter l’établissement d’un diagnostic et de contribuer à l’élaboration de recommandations de traitement particulières liées au problème ou au diagnostic. L’objectif de l’évaluation consiste à recueillir des renseignements plus précis et plus détaillés afin d’acquérir une compréhension globale d’un problème potentiel. L’évaluation inclut d’autres renseignements qui permettent d’inscrire les résultats dans un contexte plus vaste.
Remarque : Le dépistage et l’évaluation des déficits cognitifs d’origine vasculaire doivent être adaptés en fonction de multiples facteurs. La version actuelle des présentes recommandations comprend une section intitulée « Considérations cliniques ». On y trouve une brève discussion des questions soulevées dans l’examen des données probantes ou par consensus de spécialistes, qui ont une incidence sur le traitement ou l’interprétation des renseignements relatifs au dépistage et à l’évaluation des déficits cognitifs d’origine vasculaire.
Idéalement, il faut confirmer que les outils d’évaluation et de dépistage conviennent à une utilisation précise et à la population cible afin de permettre l’interprétation des résultats la plus juste possible.
Classification internationale du fonctionnement, du handicap et de la santé de l’OMS (Organisation mondiale de la Santé, 2001).
Déficit : problème de fonctionnement ou de structure du corps, comme une anomalie ou une perte significative (d’après la Classification internationale du fonctionnement [CIF]).
Limitation d’activité : difficultés qu’une personne peut rencontrer dans la pratique d’activités (d’après la Classification internationale du fonctionnement [CIF]).
Restrictions de participation : problèmes qu’une personne peut rencontrer dans des situations de la vie courante (d’après la Classification internationale du fonctionnement [CIF]).
Remarque sur le consentement
Dans le domaine des déficits cognitifs d’origine vasculaire, la question de la capacité à donner son consentement se pose souvent. Tout au long de ces recommandations, il est question de la personne atteinte d’un déficit cognitif d’origine vasculaire, de sa famille et d’autres proches aidantes et aidants. La personne atteinte d’un déficit cognitif d’origine vasculaire conserve les mêmes droits en matière de protection des renseignements de santé que toute personne cherchant à obtenir des services de santé, en vertu des lois nationales et provinciales. Il est entendu qu’à un moment donné, sa capacité à donner son consentement peut changer, qu’il s’agisse du consentement à ce que d’autres personnes s’occupent de ses soins et aient accès à ses renseignements personnels sur sa santé, ou du consentement à recevoir des traitements. Dans les présentes recommandations, on présume que la question du consentement a été traitée par les membres de l’équipe soignante avec la personne concernée et ses autres décisionnaires, le cas échéant. Pour obtenir de plus amples renseignements, veuillez consulter la section 5 sur la planification préalable des soins de ce module.
Cadre pour l’évaluation et le diagnostic des déficits cognitifs d’origine vasculaire
Il existe plusieurs termes utilisés dans la littérature clinique et de recherche, tous regroupés sous le terme générique « déficits cognitifs d’origine vasculaire ». Ils comprennent les suivants : troubles neurocognitifs majeurs et légers (en cas d’atteinte vasculaire); démence vasculaire; déficit cognitif léger d’origine vasculaire; déficit cognitif d’origine vasculaire sans démence; démence post-AVC; démence vasculaire ischémique sous-corticale; démence multi-infarctus; troubles neurocognitifs mixtes (en cas de diagnostics concomitants de maladies neurodégénératives, le plus souvent la maladie d’Alzheimer ou la démence à corps de Lewy) (Skrobot et coll., 2018).
Les déficits cognitifs d’origine vasculaire sont hétérogènes en ce qui a trait à leur portée, à leur gravité et à leurs répercussions. Il faut prendre en compte trois composantes principales en vue d’établir un diagnostic :
- Comprendre les capacités cognitives à l’aide d’évaluations et de dépistages validés (section 1.1).
- Identifier la maladie vasculaire cérébrale à l’aide de la neuro-imagerie (section 1.3).
- Déterminer les répercussions fonctionnelles en recueillant des renseignements sur les antécédents de la personne (fournis par cette dernière et par ses proches) et, parfois, en observant les capacités fonctionnelles de la personne chez elle ou dans un contexte de réadaptation (section 1.2).
L’établissement du diagnostic nécessite généralement l’évaluation des résultats obtenus dans le cadre des trois composantes, ainsi que la prise en compte d’autres facteurs de risque sous-jacents ou de troubles concomitants susceptibles d’aggraver la maladie vasculaire cérébrale, d’avoir une incidence sur les capacités cognitives ou d’affecter le fonctionnement.
Considérations relatives au cadre
- Les personnes touchées peuvent se trouver en premier dans l’une ou l’autre des trois situations susmentionnées (par exemple, présence de symptômes d’atteinte cognitive, puis identification d’une maladie vasculaire cérébrale, ou présence d’une maladie vasculaire cérébrale, puis évaluation des capacités cognitives; voir la figure 2). Il est donc important de prendre en compte les trois composantes lorsque l’une des situations survient, et d’adapter les approches au cas par cas.
- Évaluer les troubles concomitants
Plusieurs affections concomitantes peuvent contribuer directement ou indirectement au déclin cognitif et doivent être prises en compte et évaluées, le cas échéant :- Causes de l’AVC, comme l’athérosclérose des gros ou des petits vaisseaux, les affections cardiaques et les vasculopathies génétiques.
- Affections médicales comme l’AVC, l’insuffisance cardiaque, l’hypertension, la fibrillation auriculaire, l’arrêt cardiaque, le diabète, l’insuffisance rénale, d’autres atteintes vasculaires, l’apnée obstructive du sommeil, ou des maladies métaboliques (par exemple, les troubles liés à la vitamine B12 ou au calcium, et les troubles de la thyroïde).
- Affections neurodégénératives comme la maladie d’Alzheimer, la démence à corps de Lewy et la maladie de Parkinson.
- Affections neuropsychiatriques comme les troubles dépressifs majeurs, les troubles anxieux, le délire et la maladie bipolaire.
- Déterminer les répercussions fonctionnelles
- Le déficit fonctionnel s’observe dans un spectre allant de l’atteinte légère à grave, soit une dépendance totale. D’une manière générale, de nombreuses études de recherche font référence à deux catégories principales de déficit neurocognitif, conformément au manuel DSM-5 et à l’étude The Vascular Impairment of Cognition Classification Consensus Study (VICCCs 1 et 2). Celle-ci définit le trouble neurocognitif léger et le trouble neurocognitif majeur, également appelé démence vasculaire.
- Le trouble neurocognitif vasculaire léger (déficit cognitif léger d’origine vasculaire) se caractérise par un déclin par rapport à un degré antérieur de fonctionnement cognitif sans modification significative des activités de base de la vie quotidienne ou des activités instrumentales de la vie quotidienne. Les symptômes sont généralement considérés comme plus légers et se prêtent à la mise en place de stratégies compensatoires pour gérer les exigences quotidiennes. Cependant, les déficits peuvent affecter ou altérer le fonctionnement dans certaines activités et certains rôles professionnels, sociaux ou de loisirs.
- Le trouble neurocognitif vasculaire majeur (également appelé démence vasculaire) se caractérise par un déclin cognitif substantiel, suffisamment grave pour nuire à l’autonomie fonctionnelle (par exemple, déclin significatif d’une ou de plusieurs fonctions cognitives, entraînant un besoin d’assistance pour les activités de la vie quotidienne ou les activités instrumentales de la vie quotidienne, des rappels fréquents et des mesures de sécurité).
- Le déficit fonctionnel s’observe dans un spectre allant de l’atteinte légère à grave, soit une dépendance totale. D’une manière générale, de nombreuses études de recherche font référence à deux catégories principales de déficit neurocognitif, conformément au manuel DSM-5 et à l’étude The Vascular Impairment of Cognition Classification Consensus Study (VICCCs 1 et 2). Celle-ci définit le trouble neurocognitif léger et le trouble neurocognitif majeur, également appelé démence vasculaire.
Voir la figure 3 : Divers tableaux cliniques pouvant mener à des déficits cognitifs d’origine vasculaire (principales composantes des cheminements cliniques traitées dans les présentes recommandations)