Prochaine section 2. Considérations spécifiques sur la prise en charge pour la prévention secondaire de l’AVC pendant la grossesse
Prévention de l’AVC pendant la grossesse

1. Considérations générales de prise en charge avant, pendant et après la grossesse chez une femme ayant subi un AVC

6e édition, MISE À JOUR juin 2018


1A. Conseils préalables à la grossesse pour les femmes ayant des antécédents d’AVC
  1. La prise en charge de toutes les femmes qui ont survécu à un AVC et sont en âge de procréer doit comprendre une discussion sur la grossesse et ses répercussions sur le risque de récidive d’AVC.
  2. Selon la fertilité et les projets de grossesse des patientes, la contraception ainsi que le mécanisme et le type d’AVC doivent être abordés.
    1. En cas d’AVC ischémique ou thromboembolique, il faut faire preuve de prudence avec les contraceptifs oraux contenant des œstrogènes ou les traitements hormonaux de substitution susceptibles d’augmenter le risque de thrombose et, dans la plupart des cas, ceux-ci doivent être évités en raison du risque accru d’AVC.
    2. D’autres méthodes de contraception, y compris les contraceptifs oraux à base de progestérone seule, les dispositifs intra-utérins à progestérone seule ou non hormonaux ou une méthode de contraception dite de barrière, peuvent être envisagées. Afin d’en savoir plus, veuillez consulter la section 2 du module sur la prévention de l’AVC des Recommandations canadiennes pour les pratiques optimales de soins de l’AVC.
  3. L’évaluation des facteurs de risque d’AVC et la prise en charge pharmacologique liée à la prévention secondaire de l’AVC pendant la grossesse pourraient être abordées lors de la consultation avant la conception avec toutes les femmes survivantes d’AVC en âge de procréer. Par exemple :
    1. Des conseils sur l’alimentation saine, l’activité physique régulière, l’atteinte d’un indice de masse corporelle normal, l’abandon du tabac, la consommation d’alcool et d’autres facteurs liés au mode de vie qui peuvent augmenter le risque d’AVC récidivant pendant la grossesse. Remarque : les considérations de routine pour toutes les femmes envisageant une grossesse sont traitées ailleurs, par ex. dans les Recommandations de Santé Canada en matière de grossesse en santé
    2. Un examen des analyses pour s’assurer que le bilan des facteurs étiologiques de l’AVC a été fait et que des stratégies de prévention secondaires appropriées sont en place. Afin d’en savoir plus, veuillez consulter la section 2 du module sur la prévention de l’AVC des Recommandations canadiennes pour les pratiques optimales de soins de l’AVC.
    3. Un examen des médicaments actuels pour évaluer leur tératogénicité potentielle à l’aide des bases de données de référence disponibles (p. ex., la Developmental and Reproductive Toxicology (DART) Database; Reprotox); et la préparation d’un plan de prise en charge personnalisé pour la réduction des risques d’AVC tout au long de la période de conception, de la grossesse, de l’accouchement et de la période post-partum. Dans la mesure du possible, envisager l’utilisation des médicaments utilisés avant la conception pour lesquels des données d’innocuité raisonnables sont disponibles tout au long de la grossesse (de la préconception à l’allaitement) afin de réduire le nombre de changements de médicament pendant les stades de la grossesse.
    4. La communication entre les professionnels de la santé ayant une expertise en AVC et ceux ayant une expertise en obstétrique est encouragée pendant les étapes de consultation avant la grossesse;
    5. Une discussion sur le risque de récidive de l’AVC pendant la future grossesse.

Remarque : le traitement de la fertilité chez une femme qui a déjà eu un AVC dépasse la portée de cet énoncé de consensus et doit être traité individuellement, en collaboration avec les consultants en endocrinologie sur la reproduction et l’infertilité.

1B. Dépistage des facteurs de risque prénatals et intrapartum chez les femmes ayant des antécédents d’AVC
  1. Le bilan obstétrical initial pour les femmes enceintes ayant des antécédents d’AVC doit inclure le dépistage et l’évaluation des facteurs de risque vasculaire et les conseils sur les saines habitudes de vie. Afin d’en savoir plus, veuillez consulter le module sur la prévention secondaire de l’AVC des Recommandations canadiennes pour les pratiques optimales de soins de l’AVC.
  2. Des plans individualisés de prise en charge de la prévention des AVC basés sur les antécédents médicaux de chaque femme, le stade de la grossesse, le type et l’étiologie de l’AVC, le risque de récidive d’AVC de même que les préférences et les objectifs personnels peuvent être établis à ce moment. Ce plan qui s’appuie sur la collaboration doit inclure des considérations sur le travail et l’accouchement. Voir les sections suivantes pour la prise en charge des facteurs de risque spécifiques et des comorbidités pendant la grossesse.

Consulter la deuxième partie de cette série sur l’AVC pendant la grossesse pour obtenir des conseils sur la prise en charge d’une femme ayant subi un AVC en phase aiguë pendant la période prénatale, intrapartum ou postnatale.

1C. Prise en charge post-partum de la prévention de l’AVC pour les femmes ayant des antécédents d’AVC
  1. Le risque d’AVC est le plus élevé pendant l’accouchement et dans les 6 premières semaines post-partum. Au cours de cette période, il faudrait éduquer les femmes quant aux signes de l’AVC (p. ex., signes VITE) et leur dire d’appeler le 9-1-1 en cas d’apparition soudaine de nouveaux symptômes neurologiques, de maux de tête sévères ou de changements dans l’état mental ou l’état de conscience.
  2. Les femmes ayant des affections à haut risque ou qui requièrent une évaluation régulière (p. ex., diabète, hypertension, prééclampsie) peuvent devoir faire l’objet d’une surveillance plus étroite pendant la période post-partum. 6, 16
  3. Si cela n’a pas déjà été fait, envisager une évaluation par un spécialiste en prévention de l’AVC qui examinera le plan de prise en charge de la prévention de l’AVC à long terme en tenant compte de l’allaitement maternel :
    1. Un AVC antérieur n’est pas une contre-indication à l’allaitement.
    2. Lorsque cela est possible, l’aide d’alliés en soins de santé (ergothérapeute, spécialiste de l’allaitement) peut être utile pour faciliter l’allaitement et aider la mère à prendre soin du bébé (p. ex., pour régler les problèmes de sécurité pendant l’alimentation, les transferts ou le bain lorsque les femmes ont des déficits cognitifs ou physiques résiduels dus à un AVC).
    3. La compatibilité des médicaments de prévention de l’AVC avec l’allaitement peut être évaluée en utilisant des bases de données de référence existantes. La préférence peut être donnée aux médicaments qui pourraient être maintenus dans le cas où de futures grossesses sont désirées. 22, 28 Voir la section A de la partie 2 pour avoir davantage d’information.

La version définitive de cet article a été publiée dans l’International Journal of Stroke par SAGE Publications Ltd. © World Stroke Organization, 2017.

Justification +-

L’AVC est une cause majeure d’incapacité neurologique chez l’adulte, de décès, ainsi que de morbidité et de mortalité maternelles dans les pays développés. Sur la base des données regroupées d’une méta-analyse récente (Swartz et coll. 2017), l’AVC touche 30 grossesses sur 100 000. Il s’agit d’un taux trois fois plus élevé que pour les jeunes adultes en général (10 sur 100 000 par année), et les résultats dépendent de la détection et de la prise en charge rapides. Pendant la grossesse, on observe une plus grande variation des types d’AVC, avec une augmentation relative des thromboses des sinus veineux et des hémorragies intracrâniennes. Par ailleurs, les causes les plus courantes chez les jeunes adultes (p. ex., dissection, complications cardiaques congénitales), les adaptations physiologiques à la grossesse (p. ex., hypervolémie, augmentation des facteurs de coagulation) et les troubles spécifiques de la grossesse (HELLP, prééclampsie) se combinent pour augmenter le risque d’AVC lors de la grossesse. L’AVC est suffisamment courant pour que la plupart des spécialistes qui dispensent des soins obstétricaux ou des soins de l’AVC rencontrent des femmes qui ont déjà fait un AVC et qui veulent devenir enceintes, ou qui font un AVC pendant ou immédiatement après la grossesse. Il est donc nécessaire d’adopter une approche rationnelle pour les décisions de prise en charge, basées sur la meilleure documentation scientifique disponible et guidée par un consensus d’experts.

Exigences pour le système +-
  • Mise en place de systèmes pour permettre aux femmes qui commencent ou planifient une grossesse d’avoir accès aux soins prénatals appropriés.
  • Établissement de relations de collaboration entre les obstétriciens, les experts en médecine maternelle et fœtale et les spécialistes de l’AVC permettant d’optimiser l’accès et la prise en charge des femmes victimes d’AVC avant, pendant ou immédiatement après la grossesse.
  • Développement de systèmes de collecte de données pour surveiller les femmes victimes d’AVC avant, pendant ou immédiatement après une grossesse permettant d’améliorer les connaissances sur l’innocuité et l’efficacité des approches de prise en charge, et de favoriser l’amélioration de la qualité et les modifications des systèmes.
  • Promotion des essais contrôlés randomisés ou de vastes études observationnelles de la population, lorsque c’est possible, pour combler les lacunes dans les connaissances et accroître la capacité pour passer d’un énoncé de consensus à une ligne directrice de pratique clinique fondée sur des données probantes.
Indicateurs de rendement +-
  1. Proportion de femmes avec des antécédents d’AVC qui ont subi un AVC récurrent pendant la grossesse ou au début du post-partum.
  2. Proportion de femmes avec des antécédents d’AVC qui ont expérimenté un changement dans leurs capacités neurologiques (physiques, cognitives ou fonctionnelles) pendant la grossesse ou au début du post-partum (qu’il soit positif ou négatif).
  3. Mortalité maternelle due à la grossesse chez les femmes avec des antécédents d’AVC.
  4. Proportions et taux d’effets indésirables sur le fœtus et les résultats néonatals : anomalies congénitales, accouchement prématuré, morbidité et mortalité périnatales et pernatales.
Sommaire des données probantes +-

Prévention secondaire de l’AVC pendant la grossesse

Réduction du risque vasculaire 

Cette section se centre sur les problèmes de prévention des AVC rencontrés par des femmes qui ont déjà fait un AVC et qui veulent devenir enceintes, sont enceintes ou qui font un AVC pendant la grossesse, mais ont dépassé la phase hyperaiguë. En raison de changements dans l’hémodynamique et la coagulation, il existe un risque accru d’accidents vasculaires cérébraux durant la grossesse. On trouvera ci-dessous une synthèse des données probantes associées à la prise en charge des stratégies de prévention secondaire couramment utilisées, y compris les antithrombotiques (antiplaquettaires et anticoagulants), la prise en charge de la pression artérielle et du cholestérol, et les soins du diabète.

Antithrombotiques 

Il a été démontré que l’aspirine réduit le risque d’événements vasculaires futurs chez les personnes à risque élevé, mais son utilisation pour la prévention de l’AVC pendant la grossesse n’a pas été spécifiquement étudiée. L’aspirine à faible dose a été davantage étudiée dans le cas de problèmes liés à la grossesse, tels que la perte de grossesse récurrente, les troubles de la coagulation ou la prééclampsie. On a examiné le bénéfice potentiel de l’aspirine à faible dose chez des femmes à risque élevé présentant des antécédents d’un à deux avortements antérieurs (essai EAGeR, Schisterman et coll., 2014). Les résultats de cet essai ont indiqué que parmi les femmes essayant de devenir enceintes, il n’y avait aucune différence entre les groupes (81 mg d’aspirine par jour contre placebo) dans le nombre d’avortements (13 % contre 12 %, RR = 1,06, IC à 95 % 0,77-1,46, p = 0,78). Dans une méta-analyse incluant les résultats de trois essais, l’aspirine à faible dose n’était pas associée à une réduction du risque de prééclampsie, de prééclampsie grave ou de naissance prématurée (Roberge et coll., 2016). Plus récemment, les résultats de l’essai ASPRE (Rolnik et coll., 2017) semblent indiquer que la prise d’aspirine à faible dose (150 mg par jour), amorcée entre 11 à 14 semaines de gestation jusqu’à 36 semaines, est associée à un risque réduit de prééclampsie lors de l’accouchement avant 37 semaines, comparé au placebo (RC = 0,38, IC à 95 % 0,20-0,74, p = 0,04), sans risque accru d’événements indésirables.

L’innocuité de l’aspirine à faible dose pendant la grossesse est bien établie. Nørgard et coll. (2005) ont rapporté les résultats pour 3 415 enfants présentant quatre anomalies congénitales, qui ont été incluses dans un registre national des anomalies congénitales. Comparativement à un groupe de référence composé de 19 428 enfants présentant d’autres anomalies congénitales, l’exposition à l’aspirine n’a pas augmenté notablement les probabilités pour l’une des quatre anomalies congénitales (y compris les anomalies du tube neural, l’omphalocèle et la gastroschisis, la fente labiale ou palatine). Une méta-analyse incluant les résultats de 22 études contrôlées a donné des résultats similaires (Kozer et coll., 2002). En regroupant les résultats de huit et six études, les probabilités globales de malformations congénitales ou de malformations cardiaques n’étaient pas notoirement plus élevées dans le groupe exposé à l’aspirine (RC = 1,33, IC à 95 % 0,94-1,89, p = 0,11 et RC = 1,01, IC à 95 % 0,91-1,12, p = 0,80, respectivement). Cependant, l’incidence de gastroschisis était sensiblement plus élevée dans le groupe exposé à l’aspirine (RC = 2,37, IC à 95 % 1,44-3,88, p = 0,0006). Il existe un risque théorique de syndrome de Reye associé à la prise d’aspirine pendant la grossesse, mais aucun signalement ne le confirme.

Certaines conditions, notamment la présence de valvules cardiaques artificielles, ou les maladies liées à l’hypercoagulabilité nécessitent une thromboprophylaxie en continu, ou son initiation pendant la grossesse. L’héparine de faible poids moléculaire (HFPM) et l’héparine non fractionnée (HNF), qui ne traversent pas la barrière placentaire, sont les anticoagulants connus les plus sûrs durant la grossesse. Les antagonistes de la vitamine K (AVK) sont classés comme substance de la catégorie X par la FDA. Leurs risques et leurs avantages doivent être soigneusement évalués, car leur utilisation a été associée à un risque accru de fausse couche, d’effets tératogènes au premier trimestre et de saignements à la fois pour le fœtus et la mère. Lors de l’analyse systématique de 28 études portant sur la prise d’anticoagulants oraux par des femmes enceintes porteuses de valves cardiaques mécaniques, Chan et coll. (2000), ont signalé que même si leur prise était plus efficace pour la prophylaxie thromboembolique, la fréquence des anomalies congénitales atteignait 6,4 %. Lors d’une analyse plus récente, Xu et coll. (2016) ont inclus les résultats de 51 études (2 113 grossesses) sur des femmes ayant suivi un traitement anticoagulant lié à la prise en charge des valves cardiaques mécaniques. La fréquence des anomalies congénitales du fœtus associées à la prise d’AVK était de 2,13 % et de 0,68 % pour les AVK à faible dose. Dans les groupes de traitement par HFPM ou par HNF, aucune anomalie fœtale n’a été relevée. Les événements thromboemboliques chez la mère et les décès maternels étaient plus faibles dans le sous-groupe des AVK à faible dose (1,14 % et 0,31 %, respectivement). La survenue d’événements thromboemboliques chez la mère et les principaux événements hémorragiques prénatals était plus élevée dans le groupe de l’HNF (29,9 % et 5,3 %, respectivement). Comparativement au régime AVK à faible dose, l’incidence de l’avortement spontané et de l’embryopathie due à la warfarine était nettement plus élevée par rapport au groupe AVK à haute dose. 

Pour la prévention des complications de la grossesse associées aux thrombophilies, on a également examiné la prise d’anticoagulants, mais leur efficacité n’a pas été démontrée. Les résultats de l’étude sur la prophylaxie de la thrombophilie pendant la grossesse (TIPPS) indiquent que chez les femmes enceintes présentant une thrombophilie à haut risque de complications, l’administration antépartum prophylactique de daltéparine n’a pas réduit le risque de thromboembolie veineuse ni de complications de grossesse placentaires (Rodger et coll., 2014). Lors de cet essai, 292 femmes enceintes ont été réparties de manière aléatoire pour recevoir 5 000 UI de daltéparine une fois par jour, de la randomisation jusqu’à 20 semaines de gestation, puis la même dose deux fois par jour jusqu’à 37 semaines de gestation versus aucune de prise de daltéparine. Le critère d’évaluation principal, un composite comprenant thrombose veineuse profonde proximale, embolie pulmonaire ou mort subite de la mère, prééclampsie grave ou précoce, oligurie, œdème pulmonaire, coagulopathie, naissance d’un nourrisson petit pour l’âge gestationnel ou avortement, n’était pas grandement réduit dans le groupe de la daltéparine (différence de risque de -1,8 %, IC à 95 % -10,6 % -7,1 %, p = 0,70). Il n’y avait pas non plus de différence significative entre les trois groupes de traitement (HFPM, AAS ou association de ces deux médicaments) dans le pourcentage de naissances vivantes lors de l’essai HABENOX (Visser et coll., 2011). 

Hypertension

Les femmes souffrant de troubles hypertensifs lors de la grossesse sont exposées à un risque supérieur d’AVC, particulièrement celles qui présentent les facteurs de risque classiques (Leffert et coll., 2015), par conséquent un traitement de l’hypertension modérée à sévère s’avère crucial pour obtenir un résultat favorable. Un nombre limité d’agents, entre autres la méthyldopa, le labétalol et la nifédipine, sont connus pour leur innocuité et leur efficacité pendant la grossesse. Le bénéfice potentiel d’un régime strict par rapport à un régime moins strict chez les femmes présentant une hypertension diastolique modérée (90 à 105 mm Hg) a été évalué lors de l’étude sur le contrôle de l’hypertension artérielle pendant la grossesse (CHIPS) (Magee et coll., 2015). La fréquence de l’hypertension grave était notoirement plus élevée chez les femmes du groupe témoin avec un régime moins strict. Toutefois, il n’y avait pas de différence importante entre les groupes en fonction de la fréquence d’un des composants du critère d’évaluation principal (fausse couche, grossesse extra-utérine, interruption élective, mort périnatale, mortinatalité ou soins néonatals de haut niveau). La fréquence des complications maternelles graves n’était pas notoirement plus faible chez les femmes du groupe témoin à régime strict (2,0 % vs 3,7 %, RC corrigé = 1,74, IC à 95 % 0,79-3,84). Dans le groupe témoin à régime strict, un seul accident vasculaire cérébral/AIT a été rapporté versus aucun dans le groupe témoin à régime moins strict. Une étude de Cochrane (Abalos et coll., 2013) incluant 48 ECR (4 723 femmes) a évalué le traitement antihypertenseur pour l’hypertension légère à modérée pendant la grossesse, définie comme pression systolique de 140 à 169 mm Hg et pression diastolique de 90 à109 mm Hg. Les contrastes en matière de traitement ont comparé ≥ un antihypertenseur versus un placebo ou aucun antihypertenseur (n = 29), et un antihypertenseur par rapport à un autre (n = 22), avec une durée de traitement d’au moins 7 jours. Par rapport aux femmes n’ayant reçu aucun traitement, le risque d’hypertension sévère était significativement réduit dans le groupe de traitement actif. Alors que le risque de prééclampsie/protéinurie n’était pas significativement réduit dans le groupe de traitement actif (RR = 0,93, IC à 95 % 0,80-1,08, p = 0,34), dans le sous-groupe des bêta-bloquants, le risque de développer une protéinurie/prééclampsie était significativement réduit (RR = 0,73, IC 95 % 0,57-0,94). Les risques de décès fœtal ou néonatal, d’accouchement prématuré ou de naissance d’un nourrisson petit pour l’âge gestationnel n’étaient pas notablement réduits chez les femmes sous traitement antihypertenseur. En ce qui concerne le traitement préventif pour l’hypertension pendant la grossesse, l’étude Cochrane incluant 13 ECR chez des femmes non hypertendues a examiné l’efficacité d’une supplémentation en calcium pour réduire le risque de troubles hypertensifs durant la grossesse (Hofmeyr et coll., 2014). Les femmes ont été randomisées pour recevoir un supplément de calcium à forte dose (≥ 1 g/jour) ou à faible dose (<1 g/jour) ou un placebo, jusqu’à l’accouchement. La supplémentation en calcium fortement dosée était associée à des risques grandement réduits d’hypertension (RR = 0,65, IC à 95 % 0,53-0,81, p <0,0001) et de prééclampsie (RR = 0,45, IC à 95 % 0,31-0,65, p <0,0001). La supplémentation en calcium à faible dose a également été associée à un risque sensiblement réduit d’hypertension (RR = 0,53, IC à 95 % 0,38-0,74, p <0,0001). 

Prise de statines

Bien que les bienfaits de l’utilisation des statines en prévention secondaire soient bien établis, le traitement par statines n’est généralement pas justifié pendant la grossesse, car l’altération du métabolisme lipidique est une adaptation physiologique de la grossesse. Le développement de certaines cellules (p. ex., la myéline) et l’accumulation de graisse chez le fœtus dépendent du métabolisme des lipides. Les statines ont été classées dans la catégorie X pendant la grossesse et sont contre-indiquées compte tenu de leur potentiel tératogène. Plusieurs rapports ont été publiés comparant les résultats pour des femmes exposées accidentellement aux statines pendant la grossesse avec ceux de femmes non exposées. Certaines études ont montré des résultats ambigus qui suggéraient que l’utilisation de statines, en particulier au cours du premier trimestre, est associée à des résultats fœtaux et maternels défavorables. Dans la plus grande étude de cohorte (Bateman et coll., 2015), l’utilisation de statines était associée à un risque significativement accru d’anomalies congénitales dans l’analyse non ajustée (RR = 1,79, IC de 95 % 1,43-2,23), mais cet effet n’était plus observé dans une analyse utilisant les scores de propension, ajustée pour l’âge, le diabète et d’autres facteurs de confusion (RR = 1,07, IC à 95 % 0,85-1,37). Dans une méta-analyse, Zarek et Koren (2014) ont inclus les résultats de six études contrôlées et conclu que la prise de statines pendant la grossesse n’était pas associée à un risque accru de malformations congénitales (RR = 1,15, IC à 95 % 0,75-1,76, p = 0,52), malgré une augmentation significative du risque de fausse couche (RR = 1,35, IC à 95 % 1,04-1,75). Dans une étude cas-témoin, Winterfeld et coll. (2013) ont signalé que la fréquence des anomalies congénitales majeures n’était pas notablement plus élevée dans le groupe exposé aux statines (4,1 % vs 2,7 %, RC = 1,5, IC à 95 % 0,5-4,5, p = 0,43), tandis que les fréquences d’accouchement prématuré, de fausse couche ou de mort fœtale étaient significativement plus élevées dans le groupe exposé aux statines. Plus récemment, Karalis et coll., (2016) ont examiné les résultats de 16 séries de cas, études de cohorte, méta-analyses et ECR, et conclu qu’il n’y avait aucune preuve claire d’une relation entre les anomalies congénitales et l’utilisation de statines pendant la grossesse, ce qui les a amenés à suggérer qu’elles n’étaient probablement pas tératogènes tout en recommandant d’éviter leur utilisation. 

Diabète

Les femmes souffrant de diabète gestationnel courent un risque accru d’AVC prénatal (Scott et coll., 2012, James et coll., 2005), et peuvent présenter un risque d’AVC jusqu’à 7 ans après l’accouchement (Goueslard et coll., 2016). Dans les études qui ont examiné la relation entre le diabète gestationnel et le risque futur de maladie cardiovasculaire, y compris l’AVC, la force de la relation est atténuée après ajustement pour l’âge et le diabète ou la ménopause ultérieurs (Archambault et coll., 2014, Savitz et coll., 2014, Shah et coll., 2008). Il a été démontré qu’une alimentation à indice glycémique faible réduit significativement la glycémie à jeun et la glycémie postprandiale à deux heures comparativement à un groupe témoin consommant des aliments à indice glycémique intermédiaire ou élevé chez les femmes atteintes de diabète gestationnel, sans antécédents de diabète (Ma et coll., 2014). Une cible de glycémie postprandiale d’une heure <7,8 mmol/L a été associée à de bons résultats et a été suggérée comme une cible raisonnable pour les femmes atteintes de diabète gestationnel (Thompson et coll., 2013).

Considérations pour la prise en charge des étiologies spécifiques d’AVC pendant la grossesse

Il existe peu de données sur la prise en charge de certains cas d’AVC ischémique survenant pendant une grossesse, comme l’AVC d’origine cardioembolique, la thrombose du sinus veineux cérébral (TSVC), la dissection des artères cervicales, le syndrome des antiphospholipides (SAPL) et l’AVC cryptogénique. L’ensemble des données est en grande partie composé de rapports de cas et de séries de cas. Indépendamment de l’étiologie, le traitement par anticoagulants oraux ou antiplaquettaires (aspirine) semble être une pratique courante. 

En dehors de la grossesse, les dissections des artères cervicales sont habituellement traitées avec un antagoniste de la vitamine K ou un antiplaquettaire (aspirine) pendant trois à six mois. Les rapports de cas de femmes traitées pour des dissections carotidiennes et vertébrales survenant pendant la période prénatale et au début de la période post-partum indiquent que les mêmes stratégies de prise en charge sont utilisées (Shanmugalingam et coll., 2016, Baffour et coll., 2012, Waidelich et coll., 2008) sans effets indésirables rapportés pour la mère ou le nouveau-né. La prise d’anticoagulants ou d’antiplaquettaires parmi une série de 62 femmes ayant présenté une TSVC pendant la grossesse a été rapportée par Ciron et coll., (2013). Les stratégies de prévention employées lors des grossesses subséquentes comprenaient l’absence de traitement (n = 3), un traitement anticoagulant pendant toute la grossesse, avec ou sans aspirine; un traitement anticoagulant au cours du 3e trimestre de grossesse, avec ou sans aspirine; un traitement anticoagulant pendant toute la grossesse et la période puerpérale. Demir et coll. (2013) ont rapporté 19 cas de TSVC associés à la grossesse et ont noté que toutes les femmes étaient traitées par HFPM (énoxaparine) à une dose de 95 UI/kg deux fois par jour pendant la durée de la grossesse. L’aspirine et la warfarine ont toutes deux été utilisées en prévention secondaire chez 68 femmes qui avaient déjà souffert d’une thrombose du sinus veineux cérébral avant leur grossesse (Lamy et coll., 2000).

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